Dans l’intimité des plus précaires à Lyon (1/2)

Comment se glisser dans l’intimité des plus précaires de l’agglomération lyonnaise sans être voyeur ou même impudique ? Dans la revue Chabe! (toujours disponible en librairie), Philippe Merchez et Romain Bagnard proposent deux approches pour raconter la vie en squat ou en logement d’urgence. Cette semaine : « Logements précaires », une série photographique de Philippe Merchez. Un article de Nicolas Delattre.

« C’était en face de la rue Garibaldi, dans un ancien immeuble. Je frappe à la porte : un mec de 30 ou 35 ans, black, sapé, baraque. Le mec était réfugié statutaire. Il avait l’air bien. Et puis je rentre et il n’avait rien, ou presque. » Malgré 40 ans de carrière, Philippe Merchez se rappelle chacun des lieux qu’il a photographiés, chacune des personnes qui y habitaient. Il a débuté par un reportage en 1980 au Nicaragua, pour suivre à ses frais les activités du Secours populaire. « Je le faisais pour l’envie de voyage, d’avoir une posture politique, en tout cas humanitaire, par rapport à mon travail photographique », explique-t-il. Ce premier voyage guidera le reste de sa carrière.

Quand il travaille sur les logements précaires, Philippe Merchez prend le parti de ne jamais faire apparaître de personnage dans ses photos. C’est à la fois un moyen de protéger ces individus, « qui pour certains vivent dans une misère absolue, même s’ils ont un logement », et l’expression d’une volonté artistique. « Le vide est plus parlant, parfois. Les gens s’y projettent plus facilement, ils s’imaginent vivre dans ces lieux. C’est ce que je recherche. »

« Le vide est plus parlant, parfois. Les gens s’y projettent plus facilement, ils s’imaginent vivre dans ces lieux. C’est ce que je recherche. »

Dans ces logements de fortune, le confort se résume à une couette, « la plupart du temps fournie par les associations ». Les plus chanceux, familles, couples, sont dotés d’un téléviseur cathodique, d’un micro-ondes, voire d’une machine à laver. Les autres font appel à la débrouille : câble en guise d’étendoir, quelques palettes superposées pour étagères.

En entrant chez les gens, le photographe immortalise tout ce qu’ils possèdent, et parfois la différence est flagrante : « Il arrive qu’on se rende compte que certa

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