
Entre situations épineuses, précarité et mépris, les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) jonglent avec les difficultés pour pratiquer leur métier et portent l’« école inclusive » à bout de bras. Un reportage de Romain Zanol, illustré par Nicolas Breban.
« Le mois dernier, un petit de huit ans a tenté de se suicider… J’en ai fait des cauchemars pendant deux semaines. » Louis a 26 ans, il est AESH (accompagnant d’élèves en situation de handicap) dans une école de Villeurbanne. Le 5 décembre dernier, il était dans la rue pour l’appel à la grève du service public afin d’« exprimer un ras-le-bol général ». En marchant, il dépeint son quotidien : les classes « sans chauffage, certaines sans lumière », les volets roulants qui se sont détachés du mur et écrasés cinq mètres plus bas (sans blesser personne), ou encore l’enfant qui « est monté sur le toit du bâtiment et a menacé de sauter ».
Face à ces situations difficiles, face à la détresse de certains enfants, Louis se sent « démuni et isolé. Je n’ai pas été formé pour ça ! » Il faut dire qu’au départ, ce Lyonnais de naissance n’avait pas forcément vocation à être AESH. Son master de musicologie en poche, à la recherche d’une rentrée d’argent, il a postulé « un petit peu par hasard » dans une école de Villeurbanne, pour un poste d’AESH en maternelle. Engagé, il se retrouve parachuté dans une classe d’une quinzaine d’élèves avec deux enfants en situation de handicap à sa charge. Alors forcément, au début, il était « complètement perdu ». Titulaire du BAFA (brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur), il a « un bon contact avec les enfants et la capacité à vite créer du lien », mais devant des enfants en situation de handicap, il n’a aucune formation spéciale.
Louis n’est pas seul dans cette situation : nombre d’AESH sont recrutés sans formation préalable. Marcel, lui aussi en poste dans une école de Villeurbanne, pose le même constat : « Pour quelqu’un qui ne connaît pas le public des enfants handicapés et qui arrive d’un coup, ce n’est pas évident. »
Pour devenir AESH, en effet, nul besoin d’un diplôme particulier. Une fois la prise de poste effectuée, ils ont un an pour suivre une formation de 60 heures. Avant d’être AESH, Marcel était professeur des écoles au Sénégal, il avait donc déjà une expérience avec les enfant